En pleine pandémie, le ministère a estimé prioritaire de publier un décret (3 avril 2020) rendant obligatoire pour tous les BTS (et DUT et licences) la passation d’ « au moins une certification » privée en anglais « étant reconnue au niveau international et par le monde socio-éco- nomique », à compter de la session 2022 et dès 2021 pour toutes les licences de langues, y compris d’anglais... Vous avez bien lu.
Un appel d’offres a été lancé en février et un financement public est prévu pour 2021 : 3,1 millions d’euros en 2021 et ... 32 millions en 2022... (non, il n’y a pas d’oubli d’une virgule).
Aucun gage de réussite ne sera exigé pour l’obtention du BTS (ou des autres diplômes). Et finalement, c’est ce qu’il y a de plus instructif : le ministère n’a que faire du niveau d’anglais des étudiant.e.s, ce qui compte, c’est de payer, payer et payer encore des organismes privés qui vivent des passations de tests à échelle industrielle, utilisant autant que possible la main-d’oeuvre gratuite des enseignant.e.s du service public. Ce qui compte, c’est la validation par le « monde socio-économique ». Ce qui compte, c’est une gestion d’école de commerce en lieu et place de politique éducative. Ce qui compte, c’est décrédibiliser le service public, les enseignant.e.s et les diplômes nationaux. Comme si les diplômes gratuits n’avaient plus aucune valeur. Si le niveau d’anglais des étudiant.e.s importait au gouvernement , pourquoi ne pas augmenter les heures de cours, diminuer les effectifs, revenir aux épreuves écrites et orales nationales disparues depuis plus de 10 ans et même, soyons fous, aux programmes spécifiques de langue par BTS ? Et s’il voulait accorder un plus aux étudiants qui le souhaitent, pourquoi ne pas favoriser l’obtention du CLES, diplôme gratuit, national et reconnu internationalement et sans limite de validité ?
Le gouvernement actuel, même s’il s’engouffre dans une brèche ouverte depuis 2006 avec la multiplication pernicieuse des certifications en langues, change de braquet. C’est une vente à la découpe qui commence. Elle nous concerne toutes et tous. Nous laisserons-nous faire ?
Catherine Piécuch