Le SNES-FSU revendique pleinement son identité de syndicat de métier. Ainsi, c’est dans la pratique quotidienne du métier que l’action syndicale prend son sens. Le bulletin académique a voulu donner la parole aux collègues enseignant.es dont les disciplines sont de plus en plus menacées. Chacun.e nous fait part de son vécu professionnel et du sens donné à son enseignement, et par là même, à son métier.
Laurence, Professeure de technologie
Peux-tu nous décrire la situation de ta discipline ?
La suppression de la techno en 6e a été un véritable traumatisme. Les six mois qui ont suivi l’annonce ont été très compliqués, on ne savait pas de quoi serait fait notre avenir. On nous a fait comprendre par voie de presse que nous ne pourrions plus enseigner notre discipline aux 6es et que nous serions remplacés par des profs de SVT ou de physiques. On s’est vraiment senti dévalorisé.
Quels sont les impacts sur ton poste et sur ta situation personnelle ?
Dans mon collège, un poste a été supprimé à l’occasion d’un départ en retraite. J’ai eu de la chance, étant la dernière arrivée dans l’équipe. Comme nous sommes un gros collège et que nous avions des demi groupes, ce sont 16 heures qui ont disparu.
En quoi considères-tu que l’affaiblissement de ta discipline constitue un manque pour les élèves ?
Les élèves en cycle 4 vont manquer de connaissances et de vocabulaire de base pour appréhender la discipline. Par conséquent, on va compenser en accélérant les apprentissages ! Et puis, il y a ce paradoxe : nous vivons dans un monde où la technologie prend énormément de place et en même temps on affaiblit son enseignement. C’est absurde.
Alain, Professeur d’arts plastiques
Peux-tu nous décrire la situation de ta discipline ?
A la rentrée prochaine, nous perdrons 2 classes. Je me retrouve en déficit de 2 heures. Au regard de la DHG, je n’ai pas la possibilité de dédoubler certaines classes sans pénaliser d’autres collègues. Je me retrouve donc avec un CSD de 3h à effectuer dans un établissement situé à une douzaine de kilomètres supplémentaires.
Quels sont les impacts sur ton poste et sur ta situation personnelle ?
Ma mission s’étoffe et les classes passent de 25 à 30 élèves. J’entends bien la baisse démographique mais l’ « optimisation comptable » des élèves me révolte. Comment gérer en pratique un effectif de 30 élèves de plus en plus hétérogènes (TDA, DYS, Allophones, …), sans accompagnement puisqu’en arts nous en sommes souvent privés. Le problème principal, ce sont les effectifs par classes et par conséquent le temps accordé à tous les élèves. 28 à 30 élèves en pratique c’est définitivement trop ! Cette année, je suis aussi à plus de 6 mercredis après-midi de formation ! Quand évaluer les écrits de mes élèves, préparer mes séquences, organiser les sorties et l’ouverture culturelle ?
En quoi considères-tu que l’affaiblissement de ta discipline constitue un manque pour les élèves ?
Arts plastiques et éducation musicale sont des disciplines nodales qui créent des liens entre les citoyens et c’est sans doute cela le rôle de la culture… Pour émanciper et éviter l’uniformisation de la pensée, nos disciplines doivent encore s’adresser à l’ensemble des élèves. L’éventuelle « optionnalisation » de nos matières seraient évidemment catastrophique.
Hélène, Professeure d’allemand
Peux-tu nous décrire la situation de ta discipline ?
La réforme de 2016 avait déjà bien attaqué la diversification en stoppant les bilangues et en réduisant la LV2 à 2h30 d’enseignement par semaine dès la 5e. La réforme Blanquer a, quant à elle, fait dramatiquement se réduire la place des LVC. Nous sommes inquiets également de voir émerger l’idée que la LV2 puisse devenir une option au collège.
Quels sont les impacts sur ton poste et sur ta situation personnelle ?
Nous nous démenons pour faire la promotion de nos langues dans les écoles primaires environnantes, chaque année nous nous battons pour maintenir les heures réglementaires pour chaque niveau. Nous enseignons en général sur deux établissements voire trois. C’est une surcharge de travail considérable, nous sommes épuisés.
En quoi considères-tu que l’affaiblissement de ta discipline constitue un manque pour les élèves ?
Affaiblir notre discipline, c’est ne pas donner de perspectives d’avenir. C’est un non sens. Selon moi, il faut avoir l’ambition d’offrir à tous nos élèves une offre linguistique de qualité. Apprendre une langue c’est apprendre à s’ouvrir à l’autre, à le comprendre, à l’accepter. Cela devrait être à l’image de ce qu’est censée être l’Ecole de la République.