Conseil syndical du 8 septembre 2016
La grève du jeudi 8 mars était un pari risqué ; les chiffres de grévistes sont très loin des chiffres des mobilisations de l’an dernier, mais ce pari a permis d’amener les questions éducatives au premier plan depuis 8 jours avec des médias qui ont cherché à s’intéresser plus que d’habitude aux tenants et aboutissants de la réforme du collège et du système de remplacement, et aux conditions de la rentrée déclinées ci-dessous car les années se suivent, les conditions de rentrée s’aggravent :
– Remplaçants titulaires et non-titulaires (enseignants et CPE) utilisés de plus en plus tôt puisque des postes restent vacants à l’issue du mouvement par manque de titulaires, obérant les moyens mobilisables après la rentrée, y compris dans des disciplines dites pléthoriques il y a encore peu (allemand ou sciences physiques). La faute en incomberait au déficit de vivier selon le recteur, mais qu’a t-on fait pour rendre nos métiers attractifs auprès des étudiants et des diplômés qui désertent les concours, comme en témoignent les chiffres des résultats aux CAPES interne, réservé ou externe, et même dans certaines agrégations ?
– Effectifs par classe connaissant des hausses démographiquement prévisibles et pourtant volontairement non anticipées, il n’y a pas de petites économies, même si elles doivent se faire au détriment des élèves (et de tous les élèves, l’éducation prioritaire – 1/3 des collèges dans l’académie - n’étant pas épargnée). La section académique du SNES-FSU demande qu’un bilan national quantitatif et qualitatif (effets sur les filières technologiques notamment) soit réalisé des effets de la circulaire sur le « passage automatique » en 1re et sur la question de l’accueil des doublants de terminale.
– Manque de moyens conduisant à des déréglementations en lycée, préfigurations de la future réforme du lycée annoncée par le gouvernement ?
– Locaux laissés à l’abandon et Conseil Régional, pour les lycées, sourd aux revendications légitimes des personnels qui souhaitent seulement accomplir leurs missions dans un cadre de travail serein et décent. Le Conseil Régional n’a à ce jour donné aucune réponse claire aux organisations syndicales et aux établissements sur la reconduction ou non des subventions : par exemple, orientation sur les budgets complémentaires, subventions pour les sorties pédagogiques, … Des travaux prévus ou engagés sont suspendus, avec des conséquences sur la salubrité des locaux accueillant les élèves comme pour les logements utilisés par les personnels en NAS. Le SNES académique va lancer une opération de recensement des dégradations constatées et des risques potentiels pour les élèves et les personnels afin de mettre la Région et le Rectorat face à leurs responsabilités.
– Le conseil départemental du Nord a décidé d’externaliser l’entretien des collèges dans le but de réduire les coûts. A la rentrée, les anciens contractuels TOS ne sont pas réemployés et les personnels titulaires doivent se répartir les tâches sans perspectives pour la suite de l’année. Le SNES académique prépare une motion destinée à aider les élus en CA confrontés à ce problème.
A cela s’ajoutent les effets de la réforme du collège et du renouvellement complet des programmes des 4 niveaux la même année, autant de mesures quasi-unanimement rejetées et qui plongent les personnels dans de grandes difficultés dès la rentrée.
Réforme du collège :
Le SNES-FSU a porté la mobilisation toute l’année dernière, il continue la lutte à cette rentrée pour que notre conception d’une Education nationale, égalitaire et exigeante s’impose, en organisant la résistance à tous les niveaux, en poursuivant pour cela l’information des parents et de la profession, en dénonçant la casse du cadre national des enseignements et la situation de l’enseignement privé qui s’exonère des réglementations nationales pour maintenir et développer des options désormais interdites dans le public comme les classes bilangues ou le latin. La grève du 8 septembre au-delà des chiffres de grévistes, a permis de remettre le dossier collège sur le devant de la scène, et de mesurer une nouvelle fois le rejet de la réforme, mais aussi les attentes de la profession, sidérée par les exigences nouvelles et démentielles de l’institution ; de nombreux collègues découvrent encore qu’il leur faudrait mener de front la préparation simultanée des programmes, la production de projets, s’inscrire dans des parcours qui leur échappent, voire modifier leurs modalités d’évaluation en vue d’un nouveau Diplôme du Brevet qui n’a plus de National que le nom … Tout en subissant la mise en place du LSUN. Comme si cela ne suffisait pas, de nombreux établissements ont été sommés de mettre en œuvre l’inclusion massive des élèves pré-orientés en SEGPA dans les classes, ainsi privés d’enseignement adapté, et ajoutés à des effectifs saturés que nos collègues ne voient pas comment prendre en charge. Face à une profession dans l’attente de repères concrets pour exercer au mieux ces missions, et face à un gouvernement qui n’en finit plus de s’affaiblir, le SNES a l’opportunité de communiquer : la résistance pédagogique a permis de limiter l’application des mesures les plus négatives de la réforme : la mise en œuvre au carré des enseignements complémentaires (AP/EPI), leur semestrialisation / annualisation. Dans ce contexte, la profession est en attente de modalités que le SNES doit rapidement proposer à la profession, pistes d’actions concrètes qui permettent à quelques mois d’échéances électorales majeures, de démontrer et acter l’échec pédagogique de la réforme. Comme par exemple un observatoire de la mise en place de la réforme du collège et de la détérioration des conditions d’exercice (« cahier noir ») afin de poursuivre l’accompagnement des collègues dans la résistance pédagogique. La résistance pédagogique doit s’accompagner d’une parole forte du SNES concernant les exemples concrets sur lesquels la profession pourra s’appuyer en restant dans le cadre des textes réglementaires :
– renseignement et validation du socle uniquement lors du conseil de classe du 3e trimestre en fin de cycle 3 et fin de cycle 4.
– l’enseignant seul décide d’une évaluation périodique chiffrée ou par compétences
ne rendre aucun projet d’EPI à réaliser (en dehors du volontariat des collègues), etc ...
PPCR :
Autre chantier mis en place par le ministère de la Fonction Publique : celui de la « revalorisation » qu’il a choisi d’adosser à la refonte de l’évaluation dans le cadre du PPCR, alors que rien ne l’y obligeait (la déconnexion de l’évaluation et de la promotion pouvait se dérouler sans toucher à l’existant, pour laisser le temps de mener une vraie réflexion sur notre système actuel). Le risque est en effet grand non seulement de créer une usine à gaz (dont on peut se demander à quoi elle rime pour l’évolution de carrière), mais surtout d’augmenter le pouvoir des chefs d’établissement, dans un contexte plus général de destruction du caractère national de l’Education.
Le dossier PPCR et les réactions que les premières annonces suscitent chez les personnels qui s’informent, montrent l’importance que la question revêt. Même si nous pouvons nous réjouir d’un passage à un rythme pratiquement unique qui aura pour premier effet d’assainir le rapport à l’inspection et de retirer un peu de pouvoir à certains potentats locaux, il n’est toutefois pas celui du choix. D’autres avancées comme le transfert de primes en points d’indice pourraient amener une augmentation de pension de retraite à la condition d’un maintien des règles en vigueur, (un alignement sur le privé amputerait de près de 20% les pensions), il en est de même pour les engagements de revalorisation jusque 2020 que les prochaines élections présidentielles peuvent remettre en cause. Il faut marteler que la revalorisation proposée n’est qu’un premier pas obtenu par nos mobilisations, qu’elle reste insuffisante à tous les échelons, que le principe du grade et les modalités de l’accès à la classe exceptionnelle sont inacceptables.
Concernant l’évaluation, nous défendons à juste titre la nécessité de reprendre la main sur le métier en tant que concepteurs de celui-ci. Or, cette conception est en opposition avec la volonté sous-jacente au projet d’évaluation de limiter la liberté pédagogique en nous mettant sous pression constante.
Parmi les points qui doivent être impérativement modifiés dans le projet (et dans celui qui ne manquera pas de s’ouvrir pour les autres personnels comme les CPE) :
– nous devons refuser un projet qui vise à mettre en concurrence permanente les personnels au lieu de favoriser la solidarité sur les lieux de travail.
– nous devons refuser l’artifice que constitue la rédaction d’un bilan professionnel par le personnel concerné : on sait très bien que certains s’auto-censureront alors que d’autres en comprendront l’intérêt pour leur carrière, en tout cas, cet exercice ne sera en rien révélateur de la réalité du travail accompli.
– nous devons refuser le poids qui va être donné au chef d’établissement, à la fois par la nature pédagogique du regard qu’on veut lui donner, mais aussi par la fréquence des rendez-vous et la pression que cela ne manquera pas de susciter. La notation future doit respecter les équilibres actuels en donnant un poids prépondérant aux IPR. Le SNES doit défendre une notation de l’enseignant s’appuyant principalement sur le cœur du métier : la pédagogie et le travail en classe. La lecture du projet d’évaluation des personnels, à travers le prisme de la réforme du collège, nous montre les dérives et pressions manageriales qui sont susceptibles d’en découler ; c’est pourquoi nous refusons dans les formulations toute intrusion de l’administratif dans la capacité d’évaluation de l’aspect pédagogique (capacité de travailler en équipe, réalisation de projets, …), ceci afin de ne pas se voir dessaisir de nos pratiques et être en capacité de reprendre la main sur nos métiers. Le PPCR ne peut être l’outil d’une généralisation à l’Education Nationale de l’entretien professionnel annuel, prévu par la loi du 3 août 2009 (relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique), à laquelle nous dérogeons par le maintien de la note chiffrée. Sur le terrain, l’expérience montre que les tentatives de mise en œuvre de l’entretien annuel vont systématiquement dans le sens d’un management fondé sur la performance chiffrée, l’accompagnement des réformes et la concurrence interne à l’établissement.
– nous devons refuser l’évaluation par compétences et demander le maintien de la note chiffrée, pour des questions de lisibilité pour l’intéressé et de défense du paritarisme alors que cette évaluation aura des conséquences sur la carrière (comment étudier des dossiers qui ne comporteraient que des appréciations littérales ?). Avec une note chiffrée, les choses sont claires et, sauf manquement manifeste à ses missions, la note n’est pas baissée et sert de base d’année en année ; avec une évaluation par compétences, la remise en cause sera permanente et fera vivre aux titulaires pendant toute leur carrière ce que vivent les stagiaires l’année de leur validation.
Enfin, le conseil syndical appelle à la mobilisation lors de la journée du 15 septembre, à l’appel de l’intersyndicale interprofessionnelle contre la loi Travail.
Unanimité des 37 votants